Cultures oléagineuses : Le Maroc s’investit pleinement dans les filières colza et tournesol.
Le colza et le tournesol possèdent bien d’autres atouts que le célèbre jaune de leurs fleurs. Riches en huile et en protéines végétales, les tourteaux et huiles issues de la trituration font l’objet d’utilisations très diverses. Entre 2019 et 2020, des millions de tonnes d’huiles et de tourteaux des deux cultures ont été consommés. Aujourd’hui, le programme Maghreb Oléagineux dresse son bilan couronné par des résultats favorables, passant ainsi la flamme aux professionnels, prêts pour un avenir prometteur.
Les besoins agricoles au Maroc demeurent importants. Selon le Département de l’agriculture des États-Unis (USDA), le Royaume est à plus de 90% de dépendance vis-à-vis des importations d’huiles de graines et de tourteaux. Entre 2019 et 2020, 606 000 T d’huiles de graines ont été consommées, avec 1 080 000 T de besoin en tourteau. Aujourd’hui, le développement de la filière oléagineuse doit contribuer à l’amélioration de la balance commerciale du pays, en favorisant la réduction des importations.
Le développement et la structuration de la filière oléagineuse ont été impulsés par le lancement du PMV en 2008. « Suite à la faiblesse de l’apport pluviométrique, la superficie des oléagineux a diminué considérablement ces dernières années. Pour répondre à cette problématique, et afin de donner un nouveau souffle à cette culture, le PMV a créé une nouvelle dynamique socio-économique, notamment les projets d’agrégation qui lient les acteurs de l’amont avec ceux de l’aval. Cette dynamique a créé un effet d’entrainement pour la culture colza. Aussi, l’assurance multirisques climatiques a permis de soutenir les agriculteurs pendant les années difficiles », déclare Mohamed Siari, Chef de service de la production végétale à la Direction régionale de l’agriculture de la région Fès-Meknès.
Ensuite, la nouvelle stratégie agricole « Génération Green » vient renforcer le secteur. Cette feuille de route permettra aux cultures de tournesol et de colza, destinées à la production d’huiles végétales pour l’alimentation humaine, ainsi que les tourteaux pour l’alimentation animale, d’atteindre 30 000 ha pour le colza et 50 000 ha pour le tournesol d’ici 2030, couvrant ainsi les besoins nationaux à hauteur de 15%. Cette transition protéique que connait le Maroc donne un nouvel élan à la conquête de la souveraineté alimentaire du pays.
Les atouts multiples des cultures oléagineuses !
Il est à rappeler que les tourteaux de colza et tournesol peuvent se substituer complètement au tourteau de soja, sans baisser les performances des animaux. Pour les vaches laitières, les essais conduits par l’institut de l’élevage en France ont montré que la substitution du tourteau de soja par du tourteau de colza permet d’augmenter la production de lait, ainsi que le taux protéique et la reprise du poids vif.
Pour el tournesol, ceci permet de maintenir le niveau de production du tourteau ainsi que le taux protéique. Côté viande de bovins, la même source démontre que le colza permet de maintenir les performances de croissances et améliorer la marge brute. De plus, le tourteau de tournesol peut également être utilisé comme seule source de protéines dans les rations pour bovins viande, ce qui emmène à des performances généralement équivalents comparativement aux autres sources de protéines.
Pour l’alimentation humaine, l’huile de colza est riche en acides gras essentiels qui ne peuvent pas être synthétisés par l’homme, et qui doivent être apportés par l’alimentation : Oméga 6, Oméga 3 et vitamine E.
Colza et tournesol : deux cultures stratégiques en plein essor
Les oléagineux ne sont pas des concurrents pour le blé !
« Les oléagineux ne sont pas des concurrents pour le blé ! », insiste Ahmed Alaoui Fdili, Secrétaire général de l’Association nationale de producteurs d’oléagineux. La consommation des produits issus des graines de tournesol et de colza connait une croissance exponentielle au Maroc, avec une augmentation de 26% pour l’huile et 38% pour le tourteau en 10 ans.
En 2020, 77 000 T d’huiles de colza et de tournesol et 460 000 T de tourteaux des deux cultures ont été consommés (Source : USDA –janvier 2022). « Historiquement, la culture du tournesol a été pratiquée en Bour dans les bassins de production situés dans la région Fès-Meknès, comme culture de printemps. Elle est pratiquée généralement en alternance, quand les conditions climatiques sont défavorables à la culture des céréales, notamment la sécheresse du début du cycle », explique M. Siari.
Le Maroc produit annuellement, en fonction des conditions climatiques, entre 25 000 et 40 000 T de graines oléagineuses qui contribuent à répondre aux besoins du Royaume en huiles et tourteaux. Même si le taux de couverture est encore faible au regard du marché, la dynamique mise en place par les acteurs de l’amont et de l’aval constitue une base solide pour le développement de la filière dans les années à venir.
L’un des principaux bassins de production des cultures oléagineuses se trouve dans la région de Fès-Meknès. Avec une contribution de 21,1% au PIB agricole nationale. « La région de Fès-Meknès est un bassin de production de premier rang au niveau national, avec une superficie agricole utile de 1 240 million d’hectares et une dynamique agro-industrielle importante autour des filières des grandes cultures. Les superficies de tournesol et de colza constituent une part de plus en plus importante dans nos assolements. À titre d’exemple, durant la campagne 2020-2021, près de 7 700 ha de colza et de tournesol ont été semés dans notre région », rappelle M. Siari.
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L’intégration des cultures oléagineuses dans l’assolement céréalier est un véritable atout pour les systèmes de production du Royaume. Ces multiples intérêts agronomiques se transforment en gains économiques pour les producteurs. Reconnues comme essentielles pour améliorer les performances et la durabilité des exploitations, les cultures oléagineuses contribuent en outre à l’amélioration des rendements des cultures céréalières, comme l’explique M. Alaoui Fdili, « l’intégration du colza et du tournesol dans les rotations céréalières représente plusieurs intérêts agronomiques permettant non seulement l’amélioration de la structure du sol, mais aussi l’accroissement de sa fertilité et sa résistance aux bio agresseurs tels que les maladies et les ravageurs, ce qui favorise considérablement les économies d’intrants pour les exploitations. De plus, les rendements d’un blé après l’intégration du colza sont en moyenne 20% supérieurs à ceux d’un blé après blé, avec des besoins en fertilisation azotée et phosphatée moins importants. »
L’accompagnement du monde agricole, au cœur du programme Maghreb Oléagineux
Le programme Maghreb Oléagineux, initié par Terres Univia en 2019 et cofinancé par l’Union Européenne, s’inscrit pleinement dans la stratégie agricole marocaine de développement et de la structuration de la filière oléagineuse. Selon Guénaël Le Guilloux, responsable du développement international chez Terres Univia et directeur d’AGROPOL, « depuis 2019, le programme Maghreb Oléagineux accompagne le monde agricole en partenariat avec l’Office national de conseil agricole (ONCA) et la Fédération interprofessionnelle des oléagineux du Maroc (FOLEA), à travers des dispositifs de formations adaptées. En 3 ans, nous avons organisé 137 Field Days sur le terrain au bénéfice de plus de 3 500 agriculteurs, et formé 103 prestataires de service et 140 conseillers locaux. Nous avons également déployé des outils pédagogiques auprès du monde agricole sous forme de guides et vidéos techniques afin de diffuser les bonnes pratiques. »
Acteur clé du développement de la filière oléagineuse, l’ONCA renforce son accompagnement auprès des agriculteurs dans les activités de conseil agricole et de formation, et œuvre au développement du réseau d’entrepreneurs de travaux agricoles. D’après l’ONCA, l’objectif principal de la convention Maghreb Oléagineux est le développement de la capacité des ressources humaines. « Grâce à notre partenariat avec la FOLEA et l’AGROPOL, l’ONCA a contribué dans la mise en œuvre du programme Maghreb Oléagineux qui fournit un soutien technique aux agriculteurs et aux conseillers agricoles. En effet, 44 conseillers de l’ONCA ont pu suivre une formation dédiée aux bonnes pratiques culturales du colza et du tournesol. Sur le terrain, nous avons également mis en œuvre 60 Field Days organisés sur des plateformes de démonstration du programme ou sur des parcelles d’agriculteurs de partager leurs savoir-faire, et d’apprendre à partir des faits observés dans les champs », indique Hassan Touabi, Chef de division de développement et gestion des partenariats, DO-ONCA.
Les agriculteurs marocains qui s’investissent dans les cultures oléagineuses sont l’avenir de cette filière. Malgré la fin du programme Maghreb Oléagineux, les efforts de formation et d’accompagnement du monde agricole sont se poursuivre grâce à la mise en œuvre du dispositif territorialisé de conseil agricole de proximité auprès des différents professionnels de l’agriculture déployé par l’ONCA.