L’agriculture biologique au Maroc est en forte expansion, grâce aux stratégies mises en place.
Ayant commencé en 1986 à Marrakech avec l’olivier, l’agriculture biologique marocaine a connu une croissance plus ou moins rapide, au fil des dernières années. En plus des efforts du Plan Maroc Vert, le royaume dispose de plusieurs atouts dans la production agricole favorisant l’émergence de l’agriculture biologique.
Au Maroc, il existe deux types de produits biologiques à savoir : les produits des plantes aromatiques et médicinales (PAM) spontanées et les produits des plantes cultivées. La superficie totale concernée par le bio au Maroc au titre de la campagne 2017/2018 s’élevait déjà à 282.480 ha dont 9.500 ha des espèces cultivées (11.000 ha en 2019), près d’un millier d’ha de cultures en cours de conversion vers le bio et 273.000 ha de plantes spontanées.
Répartition de l’agriculture biologique au Maroc
L’agriculture biologique au Maroc touche plusieurs secteurs à savoir les espèces fruitières, les cultures maraichères… Dans le détail, la production biologique pour les espèces fruitières concerne l’olivier, l’agrumiculture, l’arboriculture. Au titre de la campagne 2017/2018, celle-ci atteignait 3.568 ha dont 500 ha pour l’avocatier, 870 ha pour l’amandier, 550 ha pour le câprier et 210 ha pour le fraisier, 80 ha pour l’abricotier, 72 ha pour le grenadier et 40 ha pour le vignoble. La superficie restante demeure représentée par les autres espèces telles que le palmier dattier, le figuier, le prunier et autres…
Pour les espèces maraichères, l’agriculture biologique s’applique aux tomates, poivrons, melons, aubergines, carottes, courgettes, haricots… En outre, la répartition de la superficie par espèce montre une prédominance des arbres fruitiers avec près de 38% de la superficie globale suivie par les cultures maraichères et l’olivier avec respectivement 18% et 14%.
En ce qui concerne la répartition des superficies des plantes spontanées par espèce, elle reste majoritairement représentée par les plantes aromatiques et médicinales (PAM), la forêt d’arganier, le cactus et le caroubier.
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À noter que les PAM cultivées au Maroc englobent le câprier, le safran, la verveine, la henérosa, la lavande, le jasmin, citronnelle alors que parmi les PAM spontanées figurent le romarin, le thym, sauge, cumin, origan, coriandre, laurier rose, fenouil, pin, camomille…
En parallèle, la production biologique animale marocaine existe en faible quantité sur le marché. Il s’agit de produits tels que les volailles, les viandes rouges (ovines et caprines), les œufs, le fromage de chèvre et le miel. L’apiculture constitue, d’ailleurs, la principale production animale marocaine recensée : on compte quelques 1.242 ruches en 2015 dont 190 en conversion.
Les principales zones de culture biologique
Au Maroc, l’agriculture biologique concerne principalement huit (8) régions. Les plantations cultivées se localisent à Rabat, Azzemour, Fès, Taza, Béni Mellal, Marrakech, Agadir et Taroudant.
Les plantes médicinales et aromatiques se retrouvent au niveau de presque toutes les régions. Cependant, la région de Marrakech se distingue pour la verveine tandis que Taroudant se particularise avec le safran et Fès avec le câprier.
La vallée de Souss-Massa ressort comme la principale région maraîchère, en raison de son climat subtropical propice pour les productions hors-saison. Certaines régions côtières (Azemmour et Rabat) sont également qualifiées pour ce genre de production.
Les productions fruitières émanent de deux régions essentielles : Marrakech et Agadir. Les autres régions fruitières du royaume telles que Meknès, Azrou, Midelt et Errachidia sont encore exclues du paysage agrobiologique actuel. Celles-ci présentent cependant un potentiel énorme à exploiter.
En termes de production, la filière a généré en 2019 un volume de 120.000 tonnes contre 40.000 tonnes en 2010. C’est principalement dans les régions Fès-Meknès (19%), Marrakech-Safi (18%), Souss-Massa (16%), Casablanca-Settat (16%) et Rabat-Salé-Kénitra (14%) où se localisent 80% de la superficie cultivée sous mode biologique.
Législation marocaine sur l’agriculture biologique
La filière biologique s’appuie également aujourd’hui sur un cadre juridique réglementaire. La production biologique marocaine est, en effet, régie depuis septembre 2018 par la loi n°39-12. Ce qui fait du royaume le deuxième pays en Afrique à se doter de sa propre législation en matière de production biologique.
Sur le plan réglementaire, la filière bio compte maintenant deux organismes agréés de certification et de contrôle. Depuis l’entrée en vigueur du cadre juridique et réglementaire de la filière bio, les produits agricoles sont certifiés selon la réglementation marocaine. Et ils se vendent sur le marché sous le label Bio Maroc.
Les principaux marchés d’exportation des produits biologiques marocains
Au Maroc, la majorité des produits agricoles biologiques sont destinés à l’export. Et les volumes d’exportation ont connu une évolution remarquable, passant de 7.230 tonnes en 2007 à 17.000 tonnes en 2019.
Ils concernent essentiellement les fruits, les légumes frais (primeurs et agrumes) et les produits transformés, notamment, le jus d’orange congelé, l’huile d’argan alimentaire et cosmétique, les conserves d’haricots verts, les produits des plantes aromatiques et médicinales, les fraises surgelées et les câpres en saumure.
Les principaux marchés de destination sont la France, l’Espagne, l’Italie, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Scandinavie et la Lituanie. Les exportateurs marocains expédient aussi leurs produits bio aux USA, au Canada et dans certains pays asiatiques comme le Japon et la Corée du Sud.
Comment exporter les produits bio marocains vers les pays européens ?
Pour exporter un produit comme étant issus de l’agriculture biologique du Maroc, agriculteurs et entreprises de collecte, de transformation doivent obligatoirement faire contrôler et certifier leur activité, chaque année, par un organisme de contrôle et de certification (OCC) accrédité par l’Union européenne (UE).
Afin d’exercer au Maroc, les OCC doivent être agrées par le Ministère de l’Agriculture et de la Pêche Maritime, du développement rural et des eaux et forêts conformément aux dispositions de l’arrêté n° 270-15 relatif à l’agrément des OCC des productions biologiques.
Les défis de l’agriculture biologique au Maroc
Malgré la croissance de la filière biologique au Maroc, de nombreux défis gangrènent le secteur. Parmi eux, on peut citer :
- L’absence de valorisation des produits bio : bien que le secteur biologique marocain soit en plein essor, le royaume importe 90% des produits bio alimentaires présents en rayon.
- L’augmentation des coûts de production causée par les coûts élevés de certification, actuellement effectués par des régulateurs étrangers;
- La rareté des intrants autorisés, y compris les biopesticides et les composts sur le marché intérieur ainsi que les semences et plantes utilisées en agriculture biologique;
- Manque de communication et de promotion des produits biologiques par les entités gouvernementales sur les marchés nationaux et étrangers;
- L’absence de marché intérieur pour les produits biologiques, bien qu’il existe une demande nationale potentielle importante. Toutefois, il est à noter qu’avec la pandémie de Covid-19, il y a eu une augmentation croissante de la consommation de produits bio, les gens se dirigeant vers des habitudes alimentaires saines.
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Des mesures mises en place pour encourager l’agriculture biologique
Pour promouvoir l’agriculture biologique au Maroc, le gouvernement a développé des stratégies qui visent à la fois à inciter les producteurs à s’orienter vers la production biologique, puis à se convertir au biologique, et à sensibiliser les producteurs et la population en général à l’importance de l’agriculture organique. La principale mesure est l’octroi des frais de certification.
Pour les produits bio d’origine végétale, les subventions sont fixées selon la superficie de l’unité de production. Ces dernières varient entre un taux de 90% pour l’unité dont la superficie est égale ou supérieure à 0.5 ha et inférieure à 5 ha avec un plafond de 10.000 DH pour chaque unité par an, ainsi qu’un taux de 70% pour celle supérieure à 20 ha avec un plafond annuel de 40.000 DH par unité.
En ce qui concerne les animaux d’élevage et produits apicoles, le taux de la subvention est de 80% du coût global de certification des animaux d’élevage et des produits apicoles avec un plafond de 25.000 DH au profit de l’unité de production par an.
L’obtention des subventions pour la certification au Maroc
Pour bénéficier de cette subvention sur la certification bio accordée pour une durée de trois ans pour chaque unité de production, la demande doit être déposée auprès des services compétents de la direction provinciale de l’agriculture ou de l’Office régional de mise en valeur agricole, dont relève l’unité de production.
Cette demande de subvention se fait sur la base d’un document délivré par l’organisme de contrôle et de certification. Celui-ci devra justifier que l’unité de production est en cours de conversion vers le mode de production biologique. La demande peut aussi se faire sur la base de certificat de conformité attestant que l’unité de production est certifiée selon le mode de production biologique.
Les organisations représentatives de la filière biologique
Sur le plan organisationnel, les professionnels de la filière biologique se sont organisés en association nationale créée en 2010 ; il s’agit de l’Association Marocaine de la filière des productions biologiques (Amabi0) qui regroupait à l’époque l’ensemble des acteurs exerçant au sein de la filière biologique notamment :
- les producteurs et les transformateurs ;
- les exportateurs des produits biologiques frais et transformés ;
- les organismes de contrôle et de certification : les fournisseurs d’intrants biologiques et compostes;
- les chercheurs et personnes de la société savante ; les associations et organisations non gouvernementales (ONG) spécialisées dans la promotion de la filière biologique, la protection de l’environnement et le développement durable.
Afin de se conformer à la loi 03-12 (en vigueur depuis janvier 2015) relative à l’organisation des interprofessions agricoles au Maroc et ses textes d’application, l’organisation interprofessionnelle de la filière biologique (ex AMABIO) s’est organisée, en juin 2015, pour la création de trois associations représentant les trois principaux maillons de la filière à savoir la production, la valorisation et la commercialisation.
Les 3 associations créées constituant l’interprofession de la filière sont : AnaproBi0 : Association Nationale des Producteurs de la Filière Biologique ; Valbio MAROC : Association Nationale pour la Valorisation des Produits Biologiques ; Anadexbio: Association Nationale des Distributeurs et Exportateurs des Produits Biologiques.
En juin 2016, les trois associations ont créé la Fédération Interprofessionnelle Marocaine de la filière biologique (Fimabio). C’est en 2017 que l’État reconnaitra cette fédération en tant qu’interlocuteur unique vis-à-vis du pouvoir public pour le traitement de tous les aspects se rapportant au développement de l’agriculture biologique au Maroc. Toutefois, il est à préciser qu’en janvier 2021, le ministère de l’Agriculture a temporairement retiré sa reconnaissance à la Fimabio.
Quelques fournisseurs de produits bio au Maroc
- COOPERATIVE APIA : Produits du terroir du Maroc, alimentaires et cosmétiques
- COOPERATIVE AFOULKI : Production et vente d’huile d’argan certifiée bio
- DAR ARGAN : Production, exportation, vente d’argan et produits cosmétiques bio
- LES DOMAINES AGRICOLES : Productions agricoles et biologiques
- DOMEXPORT : Production et exportation de fruits et légumes (agrumes, primeurs, rosacées et vignes
Agriculture biologique : les objectifs futurs du Maroc
Le ministère de l’Agriculture vise à étendre aussi bien la superficie et la production biologique et par la même occasion, augmenter les exportations.
Même si les objectifs du contrat-programme 2020, arrêtés à 400.000 tonnes de production dont 60.000 tonnes à l’export, et 40.000 ha de superficie, ne sont pas encore atteints, les mesures mises en place devraient permettre de renforcer le segment biologique.
En effet, à l’instar du Plan Maroc Vert, la stratégie agricole Génération Green 2020-2030 (GG) accorde une importance capitale à la filière de l’agriculture biologique. Celle-ci se donne pour objectif d’atteindre 100.000 ha de superficie cultivée en la matière à l’horizon 2030, selon une note d’information du département ministériel de l’agriculture sur cette filière.