Dans un contexte de sécheresse et de stress hydrique grandissant, le gouverneur de la province de Tinghir, Ismaïl Heikel, a pris une décision radicale mais saluée par beaucoup : interdire la culture des pastèques sur l’ensemble de la province pour la campagne agricole 2024-2025. Cette mesure, entrée en vigueur le 8 novembre, vise à préserver les ressources en eau, largement affectées par six années consécutives de sécheresse au Maroc.
La décision s’inscrit dans une dynamique nationale, rappelée par l’appel du roi Mohammed VI lors de son dernier discours du Trône, exhortant à protéger les nappes phréatiques. Dans cette optique, le Comité provincial de l’eau a été chargé d’assurer le respect strict de l’interdiction.
Les écologistes, notamment à Zagora, où la situation hydrique est particulièrement critique, applaudissent cette initiative. Jamal Akchbab, président de l’Association des amis de l’environnement à Zagora, estime que cette mesure est un pas important, bien qu’il appelle à des restrictions similaires dans d’autres régions confrontées à une pénurie chronique d’eau. « Les pratiques agricoles intensives, comme la culture de la pastèque rouge, ont asséché nos ressources en eau. Même avec des limitations de surface, les nappes phréatiques continuent de s’épuiser », a-t-il expliqué précise un article de Bladi.
Cependant, l’interdiction suscite des divisions au sein des communautés locales. Ibrahim Zine, agriculteur dans la province de Zagora, met en garde contre les conséquences économiques d’une telle décision. Selon lui, des centaines de familles dépendent exclusivement de cette culture pour leur subsistance. « Interdire la pastèque, c’est mettre en péril l’économie locale sans pour autant résoudre la crise de l’eau », déclare-t-il, en soulignant que d’autres cultures, comme les carottes, consomment autant, sinon plus, d’eau.
Zine reconnaît néanmoins que certains agriculteurs contournent les règles en exploitant des zones non surveillées ou en omettant de placer des compteurs sur leurs puits. Il appelle donc les autorités à intensifier les contrôles pour éviter ces abus, tout en plaidant pour des solutions alternatives comme une meilleure gestion des ressources hydriques ou l’encouragement de cultures moins gourmandes en eau, telles que les palmiers-dattiers.
Lire aussi : Les agriculteurs de Tata demandent la régulation de la culture de la pastèque
La problématique dépasse largement la province de Tinghir. Le stress hydrique au Maroc est devenu un enjeu national, nécessitant des politiques audacieuses et une coordination entre autorités, agriculteurs, et experts environnementaux. L’interdiction de la pastèque à Tinghir pourrait ainsi servir de modèle pour d’autres régions, à condition d’être accompagnée de mesures économiques compensatoires pour soutenir les communautés locales.
Dans un Maroc où l’eau devient une ressource rare et précieuse, la question de l’équilibre entre écologie et économie s’impose comme un défi majeur pour les années à venir.