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La biofumigation, une méthode de lutte contre les maladies du sol

La biofumigation: Une technique fiable pour nettoyer le sol via des plantes.

La biofumigation, une méthode de lutte contre les maladies du solLa biofumigation est une méthode culturale biologique visant à contrôler le développement de bio-agresseurs (insectes, nématodes, champignons, bactéries, semences de mauvaises herbes) et à réduire dans les sols leur nombre. Elle est basée sur la libération, après la dégradation de certaines plantes, de molécules toxiques et volatiles ayant un effet pour certains organismes du sol. Plusieurs espèces végétales, mais aussi fongiques, peuvent servir à la biofumigation. Actuellement, ce sont surtout les crucifères tels que la moutarde, la roquette, le radis et les choux …, qui se prêtent spécialement pour cette technique car elles dégagent des gaz toxiques lors de leurs dégradations. Les cellules de ces plantes contiennent, en effet, des glucosinolates qui se transforment en isothio et thiocyanates agissant sur certains organismes nuisibles du sol.

Plusieurs études dans la bibliographie ont prouvé l’efficacité de la biofumigation contre certaines maladies en utilisant des plantes appartenant par exemple au genre Brassica, on cite son efficacité en culture de carottes contre la fonte des semis (Rhizoctonia solani) (Villeneuve et al., 2004), en culture de pommes de terre contre la gale commune (Streptomyces scabiei) (Gouws et Wehner, 2004), en culture de pommes de terre contre la verticilliose (Verticillium dahliae) (McGuire, 2004) et en culture de lys contre la pourriture de l’oignon… (Rhizoctonia solani) (van Os et al., 2004).

L’élément déclencheur du développement de biofumigation a été, en effet, l’interdiction du bromure de méthyle, un fumigeant chimique très efficace (Ristaino et Thomas, 1997). Ce produit à large spectre, permet de se débarrasser de la quasi-totalité des organismes nuisibles dans le sol, tels que les champignons, les bactéries, les insectes, les nématodes et les mauvaises herbes. Cependant, son effet destructeur endommage la couche d’ozone, ce qui a induit son interdiction dans les pays industrialisés, depuis le premier janvier 2005 (Protocole de Montréal de 1997). Cette interdiction a fortement stimulé le développement d’autres alternatives, surtout dans des pays qui ont besoin de trouver un échange au bromure de méthyle pour la lutte contre les organismes nuisibles du sol tels que l’Australie, l’Italie, les Etats unis. En Suisse, par exemple, la biofumigation qui présente un effet sélectif et n’agit que contre certains organismes nuisibles, constitue une méthode très intéressante pour lutter contre les problèmes phytosanitaires du sol.

La technique de la biofumigation est basée sur l’utilisation de plantes riches en glucosinolates. Lors de la décomposition de ces plantes, les glucosinolates sont transformés en isothi et thiocynates sous l’action de l’enzyme myrosinase. Les isothi et thiocynates sont volatiles et toxiques pour certains organismes du sol. Elles sortent des cellules et sont diffusées dans l’environnement. Lors de l’incorporation de ces plantes dans le sol, ces gaz pénètrent dans la terre environnante et tuent certains pathogènes, ravageurs et semences de mauvaises herbes.

Conditions de réussite de la biofumigation.

La biofumigation, une méthode de lutte contre les maladies du sol

L’efficacité de la biofumigation dépend, en effet, de l’application de conditions permettant d’obtenir un effet maximal des plantes biofumigantes lors de l’enfouissement. Pour faire de cette technique une pratique utile, la combinaison de plusieurs facteurs est primordiale :

La biofumigation nécessite des variétés spécialement sélectionnées pour cette utilisation. En effet, les différentes espèces de plantes contiennent différents glucosinolates, mais seuls certains d’entre eux génèrent des isothio et thiocyanates sous l’action de la myrosinase (Rollin et Palmieri, 2004). L’effet de biofumigation d’une plante est donc plus ou moins accentué selon la composition des glucosinolates qu’elle contient dans ses cellules (Kirkegaard et Matthiessen, 2004). Outre la toxicité potentielle du gaz, c’est la sensibilité de l’organisme visé qui détermine l’efficacité de la biofumigation. En effet, les micro-organismes, champignons et bactéries sont différemment affectés par les isothio et thiocyanates. Par exemple, de faibles quantités de ces molécules suffisent pour tuer certains nuisibles tels que Sclerotinia ou Pythium, alors qu’il faut des doses trente fois supérieures pour se débarrasser des Trichoderma (Kirkegaard et Matthiessen, 2004), aussi un isothiocyanate présent dans les racines de colza est par exemple vingt fois plus toxique pour les champignons du genre Sclerotinia que pour ceux du genre Alternaria (Smith et Kirkegaard, 2002).

Avant l’incorporation, les plantes doivent être broyées très finement afin de casser le maximum de cellules, permettant ainsi la transformation des glucosinolates en isothio et thiocyanates. Pour obtenir un effet maximal et pour accélérer le processus de la dégradation, le broyage ne doit pas seulement couper les plantes le plus finement possible, mais idéalement écraser le plus grand nombre de cellules (Matthiessen et al., 2004). Ce résultat peut être obtenu à l’aide d’un girobroyeur à marteau, ou par l’utilisation d’une faucheuse équipée d’un éclateur.

La biofumigation, une méthode de lutte contre les maladies du solIl est également recommandé d’incorporer le plus profondément possible les plantes immédiatement après le broyage et de procéder à l’irrigation de la parcelle en particulier dans des conditions de sol séchardes. L’irrigation permet non seulement d’enfouir les substances actives mais améliore aussi les conditions de transformation des glucosinolates en isothio et thiocyanates. Cette réaction biochimique nécessite en effet de l’eau. Pour cette raison, une certaine humidité du sol est indispensable au bon déroulement de la biofumigation.

En plus de l’humidité, la température du sol influence la vitesse de transformation des glucosinolates en isothio et thiocyanates. Cette transformation est une réaction biochimique dont la vitesse est fortement influencée par la température. Plus le sol est froid, plus cette transformation se déroule lentement. Lors d’un semis de printemps ou en début d’été, l’incorporation se fait à un moment où le sol est bien réchauffé. En revanche, un semis tardif en été peut se manifester par des températures assez basses (moins de 10 °C) au moment de l’incorporation, ce qui ralentit la transformation des glucosinolates et ne permet pas d’atteindre les concentrations nécessaires en gaz toxiques. Lors d’un enfouissement tardif dans un sol froid, les quantités d’isothio et de thiocyanates formés peuvent s’avérer, par ailleurs, insuffisantes et surtout la vitesse de transformation trop lente pour obtenir, un effet, de biofumigation suffisant.

En général, la réaction de biofumigation survient dans les deux jours suivant l’incorporation de la plante broyée. Pendant ces deux jours, la concentration nécessaire de gaz toxiques devrait être atteinte. Il est recommandé ainsi d’attendre une semaine avant la plantation ou le semis.

L’étude des méthodes de biofumigation ainsi que son amélioration ont fait l’objet de nombreux essais à travers le monde. En France, à l’Île-d’Orléans par exemple, l’effet de la biofumigation contre certains pathogènes du sol a été testé dans une série d’essais. Ces tests ont montré que l’enfouissement en vert de crucifères apporte une réduction des populations de nématodes des lésions et de l’incidence de la verticilliose. Une autre étude publiée par Kirkegard et Matthiessen en 2004 a montré que l’utilisation de la biofumigation contre la verticilliose donne des résultats encourageants malgré que cette maladie a été considérée comme résistante contre la biofumigation et que d’autres pathogènes du sol sont plus sensibles aux substances toxiques libérées par la biofumigation.

Dans une autre publication faite par Lazzeri et al., en 2004, les résultats des essais ont montré que la plus forte réduction de microsclérotes est obtenue avec la variété Bluformula ISCI-99 par rapport à la plus ancienne variété, ISCI-20, ce qui démontre le potentiel d’amélioration de la méthode de biofumigation par la création de nouvelles variétés. L’amélioration la plus récente consiste en l’utilisation des plantes biofumigantes sous forme de pellets.

Quant à l’influence du type du sol sur l’efficacité de la biofumigation, les informations dans la littérature sont quasi inexistantes. Cependant, une étude conduite à Agroscope ACW,a montré que selon le type de sol, ces gaz provenant de la biofumigation s’échappent plus ou moins vite, et que cette technique n’avait pas d’effet dans un sol présentant un taux de sable très élevé (80%).

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