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Dossier: la fiscalisation agricole au Maroc

Dossier: la fiscalisation agricole au Maroc

Fiscalisation agricole, après plus de 30 ans d’exonération, quelle réaction des agriculteurs face à l’imposition du secteur?

Le Conseil National de la Comptabilité vient de finaliser mardi 22 décembre, le premier projet de plan comptable agricole. A l’instar des autres secteurs d’activité, l’agriculture sera désormais sujette aux impôts. Seuls les petits et moyens agriculteurs continueront de bénéficier de l’exonération fiscale. La fiscalisation agricole au Maroc est en marche.

Dossier fiscalisationL’exonération du secteur agricole avait été installée en 1984, suite à une décision royale. Le Roi Mohammed VI avait annoncé, le Mardi 30 juillet 2013, dans son discours, à l’occasion de la fête du Trône, que les petits et les moyens agriculteurs continueront à bénéficier des exonérations fiscales qui devraient en principe cesser d’ici à la fin d’année. Seuls les grands agriculteurs seront soumis aux impôts. Une fiscalisation agricole volontairement réfléchie et progressive.

Dans son discours royal, le Roi a annoncé que le Plan Maroc Vert  contribue à la modernisation du secteur agricole, en tenant dûment compte de l’intérêt constant qui doit être porté aux petits agriculteurs, en vue d’améliorer leurs conditions de vie. « Ayant à cœur de marquer Notre sollicitude pour cette catégorie de la population, Nous continuerons à la faire bénéficier de l’exonération fiscale. Cette exemption cessera d’être en vigueur à la fin de l’année en cours pour les gros investissements agricoles, mais nous la maintiendrons en vigueur pour la moyenne et la petite agriculture », annonce le Souverain, en invitant le gouvernement à mettre en place une agence spéciale qui veille à mettre en adéquation la stratégie agricole et l’espace territorial de la population concernée, surtout dans les régions montagneuses où l’exploitation des terres marque un certain recul. La fiscalisation agricole oui, mais pas à n’importe quel prix.

l’objectif étant d’intégrer progressivement
le secteur agricole dans le système fiscal marocain…

Ainsi, une autre prorogation de la décision avait été donnée jusqu’à fin 2014. Aujourd’hui, le projet de plan comptable fait suite aux étapes franchies dans le cadre de la loi de finances au titre de l’année 2014, l’objectif étant d’intégrer progressivement le secteur agricole dans le système fiscal marocain.

La fiscalisation agricole, pour ou contre ?

Dossier fiscalisation1Exonérés d’impôts depuis près de 30 ans, les agriculteurs ne bénéficieront plus, de cette situation, considérée injuste par certains qui, pensent qu’il est  inapproprié de continuer à exonérer ce secteur, dont certaines filières sont très rentables notamment à l’export.

La situation était plutôt avantageuse pour les agriculteurs. Avec la mise en œuvre du Plan Maroc Vert, les subventions et primes à l’investissement accordées par l’Etat ont augmenté pour atteindre actuellement environ 40%. Sont concernés par ces subventions, tous les facteurs de production, du système d’irrigation à l’installation de projets de transformation de produits agricoles, d’abattage, de conditionnement, en passant par l’acquisition du matériel agricole et de traitement des cultures.

Selon un agriculteur (…) il faut tenir compte des spécificités
du secteur et de la saisonnalité de l’activité agricole

Cette stratégie de développement du secteur agricole a prévu un investissement de l’ordre de 100 milliards de Dirhams à l’horizon 2020, dont 30% est à la charge de l’Etat. Tous les facteurs étaient à la faveur de l’agriculteur. Les seuls facteurs dont souffre le secteur agricole aujourd’hui sont liés aux aliments stratégiques, notamment le sucre, le blé tendre et la farine, qui n’arrivent pas à assurer l’autosuffisance en consommation nationale. Le reste des filières bénéficient largement des systèmes de subventions accordés par l’Etat, et d’une exonération fiscale qui était, jusqu’à aujourd’hui, accordée aux producteurs.les gros agriculteurs semblent satisfaits de la nouvelle situation.

Selon un agriculteur de la région de Marrakech, le secteur doit aussi être impliqué dans la fiscalisation agricole, mais il faut également tenir compte des spécificités du secteur et de la saisonnalité de l’activité agricole. « Quels sont les critères de distinction entre les petits et moyens agriculteurs et les gros agriculteurs ? Comment l’Etat compte classifier ces catégories et quel serait le taux des impôts ? Sont des questions qui se posent aujourd’hui », ajoute l’agriculteur.

Si on se réfère au Code général des impôts, ce dernier  contient toujours des dispositions relatives à l’imposition du secteur agricole, mais non appliquées, la fiscalisation agricole sera donc d’autant plus facilement applicable.

Dossier fiscalisation2Les grands producteurs ne doivent peut être pas s’opposer à ce nouveau système, puisque la situation est bénéfique pour le pays, surtout avec la crise économique qui règne ces derniers temps et qui a poussé l’Etat à chercher des solutions pour corriger le déficit budgétaire: augmentation des prix des carburants, instauration de nouveaux prélèvements, comme celui destiné au financement de la cohésion sociale, l’endettement aussi bien en interne que sur le marché local, coupes inédites dans le budget d’investissement…

Il faut seulement trouver la formule la mieux adaptée à la spécificité saisonnière du secteur agricole qui reste souvent à la merci des aléas climatiques, et surtout tracer des critères de distinction qui permettront de classifier les petits et moyens agriculteurs et les grands agriculteurs.

Les défenseurs de la fiscalisation ont leur avis

Il faut fiscaliser les revenus et les profits agricoles et intégrer le secteur agricole dans le système des impôts, à l’instar des autres secteurs, surtout que ce secteur représente plus que 15% du PIB, tel est l’opinion des professionnels qui trouvent qu’il est injuste qu’un salarié, un artisan, un commerçant ou un industriel payent les impôts alors que l’agriculteur continue d’être exonéré malgré la mise à niveau du secteur agricole qui se confirme grâce aux efforts déployés dans le cadre du Plan Maroc Vert.

L’un des points faibles de cette exonération fiscale, c’est la catégorie qui y profite. Ce sont surtout les gros agriculteurs, parce que dans tous les cas, le petit agriculteur, représentant environ 80% du tissu agricole, ne dispose pas de revenus pouvant atteindre le seuil d’imposition, même si celle-ci soit appliquée. L’exonération fiscale n’a Dossier fiscalisation3aucun bénéfice pour le petit agriculteur, qui n’atteint même pas le seuil d’imposition déterminé par l’Etat, confirme un petit producteur de pommier dans la région de Meknès Tafilalet.

La fiscalisation agricole semble être, selon les professionnels, une très bonne décision. C’est également l’avis des agriculteurs concernés. Ce qui reste à savoir maintenant c’est sous quelle formule va se présenter cette fiscalisation, avec quels critères de distinction et si la nouvelle réforme va prendre en considération les spécificités du secteur agricole, notamment en matière de saisonnalité de l’activité, tout en gardant à l’esprit la contrainte principale de l’imposition du secteur agricole qui est le maintien de la compétitivité et du chemin tracé par le Plan Maroc Vert pour développer le secteur agricole et de faire la distinction.

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