Face à une sécheresse devenue structurelle, le Maroc se trouve à un tournant décisif en matière de gestion de ses ressources hydriques et de résilience agricole. Mohamed Taher Sraïri, enseignant-chercheur à l’Institut agronomique et vétérinaire Hassan II de Rabat, plaide dans une longue interview sur le360 pour une révision en profondeur des stratégies agricoles du pays. Selon lui, le Maroc doit impérativement mieux valoriser l’eau pluviale et miser sur des variétés de cultures plus adaptées aux réalités climatiques.
L’urgence d’une nouvelle approche
« L’agriculture traverse une situation dramatique. Il faut donc changer de logiciel de pensée. « , constate Mohamed Taher Sraïri. Les aléas climatiques sont de plus en plus imprévisibles et violents, accentuant les difficultés d’une agriculture déjà fragile. Face à ce constat, il est impératif de changer d’approche, pour l’expert il faut investir dans la recherche pour développer de nouvelles variétés de céréales, mais aussi repenser l’usage de l’eau pluviale pour soutenir l’agriculture et l’élevage.
Mohamed Taher Sraïri, considère que l’eau pluviale représente une ressource clé, sous-exploitée jusqu’à présent. Il appelle à privilégier des cultures plus résistantes et moins gourmandes en eau, telles que des céréales, légumineuses et fourrages adaptés au changement climatique. Ce modèle doit également renforcer le couplage cultures-élevage, garantissant ainsi une souveraineté alimentaire plus solide et des revenus stables pour les agriculteurs.
Territorialiser l’agriculture pour une meilleure résilience
Parmi les autres propositions, Sraïri met en avant la territorialisation de l’agriculture, une approche qui permettrait d’adapter les stratégies agricoles aux spécificités de chaque région. Le Maroc a, jusqu’à présent, misé sur une approche nationale, mais celle-ci a atteint ses limites, selon l’expert.
« L’État a fortement subventionné le système du goutte-à-goutte, mais cela ne fonctionne pas partout », constate-t-il. Chaque région du Maroc possède un climat et des conditions géographiques qui nécessitent des stratégies adaptées. Par exemple, les oasis du Sud, qui reçoivent moins de 100 mm de pluie par an, ne peuvent pas être gérées de la même manière que les zones plus arrosées de Tanger, qui bénéficient de précipitations allant jusqu’à 1.000 mm.