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Khalid BOUNAJMA: « le marché local doit accéder au conditionnement »

Khalid BOUNAJMA : « les stations de conditionnement doivent bénéficier d’aides étatiques, il faut favoriser la valorisation… »

Les stations de conditionnement souffrent au Maroc. Entre capacité de traitement horaire, manque de rentabilité et inexistence du conditionnement de la production agrumicole à destination du marché local, monsieur Khalid BOUNAJMA, président de l’Association professionnelle des Conditionneurs des Agrumes au Maroc (ASCAM) et Dirigeant de Pack-Souss, nous a fait le plaisir de dresser un état des lieux actuel de la situation et de mettre en exergue les pistes essentielles afin de mettre à niveau la filière.  

« la capacité de traitement horaire d’une station »

AgriMaroc.ma : Beaucoup de professionnels de l’agrumiculture réclament davantage de stations de conditionnement, y a t’il réellement un besoin à ce niveau là ?
Khalid-Bounajma
Khalid BOUNAJMA : A mon avis le problème des stations de conditionnement est tout autre. En effet ce qui est pertinent de mesurer, et c’est d’ailleurs l’objet d’une enquête que nous avons mené à l’ASCAM, c’est avant tout la capacité de traitement horaire d’une station de conditionnement d’agrumes, et non pas le nombre de stations ; en définitive nous avons constaté une hétérogénéité importante entre les stations selon les régions puisque certaines conditionnent 10 tonnes d’agrumes par heure alors que d’autres atteignent les 40 tonnes par heure.

Lorsque l’on sait que les stations traitent environ 500 000 tonnes d’agrumes à l’export par an, ce qui représente 25% de la production  nationale, alors que dans la même temps l’objectif de la filière est d’atteindre un objectif de 1 300 000 tonnes, alors il y a là un vrai problème!

Selon nous il faut donc au minimum doubler cette capacité moyenne de traitement horaire d’une station, ce qui revient à dire qu’il ne faut pas uniquement plus de stations, mais aussi optimiser davantage les stations existantes

« concentration de la production saisonnière, pas assez de variétés tardives »

AgriMaroc.ma : Quelles sont les régions qui souffrent le plus ?
Khalid BOUNAJMA : L’ASCAM a réalisé son assemblée générale à Beni Mellal afin de sensibiliser les producteurs de la région, dont la production soit dit en passant est estimée à 420 000 tonnes, pour se  regrouper et pour créer une station de conditionnement d’agrumes. Imaginez que dans la région de Beni Mellal il y a le potentiel d’avoir 10 nouvelles stations de conditionnement d’une capacité de 20 000 tonnes chacune afin de répondre à l’objectif de 50% de production à l’export et 50% de production locale et pour traiter 200 000 tonnes!

C’est la même problématique pour la région du Gharb ou le besoin est aussi important, il y a 3 stations aujourd’hui, 1 station de conditionnement importante et 2 autres avec une capacité plus faible. A Berkane le nombre est là mais la capacité est faible, avec une concentration de la production saisonnière entre novembre et fin décembre.

In fine la vraie problématique que nous rencontrons au Maroc, toutes régions confondues et la région du Souss n’y échappe pas c’est la concentration de la production. S’il y avait par exemple de la Maroc Late ou d’autres variétés tardives lors des mois de mars,  d’avril ou mai, alors ok nous pourrions dire « nous avons les capacités de répondre aux besoins » mais aujourd’hui la concentration des variétés est trop importante.

« il faut se focaliser sur la valorisation, la production est là, sinon nous ne ferons que déplacer le problème des vergers vers les stations »

AgriMaroc.ma : Qu’est ce qui freine le développement du nombre de stations de conditionnement ?
Khalid BOUNAJMA : Il faut savoir avant tout que les stations de conditionnement ne sont pas rentables. La production agricole et agrumicole tout particulièrement est présente, et elle a besoin de stations mais ce manque de rentabilité freine le développement du conditionnement au Maroc. C’est pourquoi nous avons demandé des aides étatiques pour nous accompagner à la mise à niveau des stations de conditionnement existantes et à l’accroissement du nombre de stations. Des aides qui ont été très importantes au niveau de la production mais qui restent marginales au niveau du conditionnement.

Pour donner des chiffres  concrets, un producteur bénéficie de subventions pour le goutte à goutte, pour les plantations… Pour le goutte à goutte ces subventions peuvent atteindre 80%, voir même 100% dans le cas de l’agrégation, mais au niveau des stations de conditionnement les aides étatiques sont marginales puisqu’elles ne dépassent pas 3% de l’investissement global.

Nous sommes signataires du Plan Maroc Vert, il faut que les 2/3 des investissements soient apportés par le privé et le 1/3 par l’état, cet équilibre n’était pas prévu dans les aides au départ mais nous avons aujourd’hui des promesses et attendons que le gouvernement soit constitué pour rééquilibrer la situation et permettre à la filière de corriger un problème qui impacte toute la chaîne. En conclusion la production est là, maintenant il faut qu’on se focalise sur la valorisation.

Il ne faut pas oublier qu’aujourd’hui la production dépasse la capacité à l’export, donc il faut trouver des débouchés sinon on va simplement transposer le problème des vergers aux stations. 

AgriMaroc.ma : Qu’en est-il aujourd’hui du conditionnement pour le marché local ?
Khalid BOUNAJMA : Le marché local doit passer par les stations de conditionnement, il s’agit là d’un marché qui représente 400 000 tonnes, car d’une part le producteur va capter la valeur du marché local qui est perdue actuellement et d’autre part le consommateur aura le droit d’avoir un produit de qualité a l’instar de l’export, qui est tracé, qui respecte les normes internationales et il ne va pas subir les erreurs d’un processus. 

Et ce point là est très important, il faut que le message passe parce que d’après la FAO, aujourd’hui 40% de la production sur le marché local est perdue car elle ne passe pas par les stations de conditionnement, parce que le fruit continue de respirer et puise dans ses réserves. On espère que l’ONSSA va donc appliquer la réglementation en vigueur pour que les fruits et légumes passent par les stations de conditionnements agrées au moins pour les produits au niveau des grandes surfaces.

Merci à Monsieur Khalid BOUNAJMA

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