Vers un essor important des pastèques rondes sans pépins ?
La culture de pastèques au Maroc est dominée par des variétés à pépins, dont les gros fruits peuvent atteindre des calibres de 8 à 12 voire 30 kilogrammes chacun. Ces variétés représentent plus de 99 % des volumes produits au Maroc. Cependant, Obeida Mansour, PDG d’Universal Peppers, interviewé par Freshplaza, voit les choses différemment.
« Depuis deux ans, nous cultivons une variété de pastèque similaire à celles produites en Espagne ou en Italie. À ma connaissance, nous ne sommes pas les premiers à l’avoir testée au Maroc, et certains producteurs ont réalisé des essais pour son développement. Cependant, chez Universal Peppers, nous sommes certainement les premiers à la cultiver à grande échelle et à l’exporter. »
La raison pour laquelle cette variété a mis du temps à être introduite au Maroc, malgré une forte demande sur le marché européen où elle est plus prisée que les variétés traditionnelles marocaines, réside dans son manque d’association culturelle et commerciale avec l’agriculture marocaine. « C’est un pari risqué. D’un côté, le marché marocain absorbe d’importantes quantités de pastèques et offre une sécurité pour écouler les excédents non exportés. D’un autre côté, les consommateurs marocains n’acceptent pas les petites pastèques sans pépins, même après les essais répétés des producteurs. La majorité des consommateurs les rejettent même lorsqu’elles sont offertes gratuitement. » souligne le producteur.
« Deuxièmement, on ne change pas une équipe qui gagne. Les pastèques à gros pépins sont très demandées en Europe. Je comprends que les producteurs hésitent à prendre des risques, et je n’ai pas commencé à cultiver ces nouvelles variétés sur un coup de tête. J’ai conclu un partenariat avec des clients européens. Deux ans plus tard, l’expérience est un succès. »
un rendement de 40 tonnes par hectare
Les conditions de production au Maroc sont parfaitement adaptées à ces nouvelles variétés en provenance d’Espagne, assure Mansour. « Nous avons commencé la production à Zagora il y a deux ans. Le climat y est très favorable, avec un ensoleillement suffisant par jour et une excellente qualité de sol. Cependant, en raison du stress hydrique à Zagora, nous avons dû déplacer la production à Guelmim. Les conditions y sont également excellentes, offrant un rendement de 40 tonnes par hectare. »
Au Maroc, les conditions climatiques permettent une culture en plein champ
« Je dirais même que les pastèques sans pépins du Maroc sont meilleures que celles d’Espagne, pour une raison très simple. Les pastèques espagnoles sans pépins sont produites sous serre, tandis qu’au Maroc, les conditions climatiques permettent une culture en plein champ, ce qui se traduit par une meilleure photosynthèse et donc un meilleur goût. Nos clients européens ont confirmé que la qualité marocaine est bien supérieure à celle de l’Espagne, de l’Italie ou du Portugal. »
Les prix à l’exportation, (…)aligné notre offre sur ceux de l’Espagne
Sur le plan commercial, le producteur se réjouit du succès qu’il connaît pour la deuxième saison consécutive. « Nous sommes dans une position confortable, car nous exportons selon des contrats. La première année, nous avons exporté en Allemagne, et cette année, nous avons pénétré le marché britannique. Nous avons connu un excédent de production cette année grâce à de meilleurs rendements à Guelmim par rapport à Zagora, malgré des opérations agricoles similaires. Nous avons essayé de liquider cet excédent sur le marché local marocain, mais sans succès. En ce qui concerne les prix à l’exportation, nous avons aligné notre offre sur ceux de l’Espagne et avons obtenu les mêmes niveaux de prix. »
Le Maroc pourra-t-il être compétitif sur le marché des pastèques ? « C’est difficile à dire. Les producteurs marocains ont la capacité de s’imposer et de changer la donne sur le marché. Mais pour cela, il faudrait que davantage de producteurs adoptent ces nouvelles variétés. La demande européenne est élevée et dépasse celle des pastèques marocaines traditionnelles à gros calibre, qui sont principalement consommées par la diaspora marocaine, arabe et turque en Europe. De plus, les prix sont plus élevés pour les pastèques rondes sans pépins. »
« Nous verrons dans les années à venir comment la situation évoluera sur le plan national. Chez Universal Peppers, nous continuerons à renforcer notre position et à augmenter notre superficie, qui passera de 13 hectares cette saison à 20 hectares l’année prochaine. Nous avons confiance en l’avenir et en l’excellence de l’agriculture marocaine. Il y a vingt ans, mon père a été le premier à introduire une variété de poivron appelée ‘kappy’ qui est aujourd’hui l’une des plus produites au Maroc. J’espère accomplir le même exploit avec les pastèques. »