La Fraisiculture Moderne : De la botanique à la Gestion de l’Oïdium – variétés, cultures et lutte intégrée.
La fraise, ce petit fruit rouge qui pousse sur les fraisiers, des plantes herbacées appartenant au genre Fragaria de la famille des Rosacées, présente plusieurs variétés cultivées. Sur le plan botanique, il convient de noter que la fraise est en réalité un faux-fruit. Ce que nous prenons pour un fruit est en fait un réceptacle charnu, sur lequel sont soigneusement disposés des akènes en de petites cavités de différentes profondeurs. Cette composition fait de la fraise un polyakène.
Contexte national et international
La particularité de la fraise réside dans son existence en trois formes distinctes : mâle, femelle et combinée. Il est à noter que les fleurs femelles ne portent pas d’anthères.
Des études récentes ont mis en évidence que les gènes responsables de la détermination du sexe chez les plants de fraisiers peuvent être localisés à divers endroits du génome. Ce génome, constitué de 56 chromosomes organisés en 7 groupes de 8 chromosomes chacun, se compare à celui de l’homme qui compte « seulement » 46 chromosomes organisés en 23 paires.
Les fraises que nous trouvons sur le marché sont des hybrides cultivés, nettement différents des fraises sauvages. Elles ont été sélectionnées en fonction de critères tels que le goût, la taille, la facilité de culture, de récolte, de conservation et de transport, entre autres.
Au Maroc, plusieurs variétés de fraises sont cultivées en fonction des conditions climatiques, des sols et des préférences des producteurs. Voici quelques-unes des variétés de fraises qui ont été cultivées au Maroc :
Festival: Une variété populaire de fraises avec une bonne saveur et une texture ferme. Elle est appréciée pour sa résistance aux maladies.
Camarosa: Une variété à gros fruits, juteux et sucrés, souvent préférée pour la production commerciale en raison de sa longue période de récolte.
Sabrina: Cette variété produit des fraises de taille moyenne à grande, avec une bonne saveur et une texture ferme.
Fortuna: Les fraises Fortuna sont également appréciées pour leur taille moyenne à grande, leur goût sucré et leur texture ferme.
Albion: Une variété de fraises remontantes, ce qui signifie qu’elles produisent des fruits à plusieurs reprises au cours de la saison. Les fraises Albion sont connues pour leur goût sucré et leur durée de conservation.
Ventana: Une autre variété remontante produisant des fruits sucrés et parfumés. Elle est appréciée pour sa résistance aux maladies.
Splendor: Cette variété est choisie pour sa tolérance aux températures élevées et sa bonne productivité.
Actuellement, ce fruit exceptionnel est cultivé à travers le globe, dans diverses conditions climatiques, tant en plein champ que sous serre. Cette réalité a été rendue possible grâce à sa riche diversité génétique et à sa faculté à s’adapter à différentes situations environnementales. À l’heure actuelle, la Chine domine en tant que leader mondial dans la production de fraises.
La menace de l’oïdium.
Un risque d’importantes pertes post-récolte
Tout comme pour d’autres cultures, les fraises peuvent être sujettes à des nuisibles et à des maladies qui menacent la qualité et le rendement des récoltes, ce qui nécessite généralement la mise en place de mesures de gestion. L’oïdium représente l’une des maladies les plus répandues et dévastatrices pour les cultures de fraises, posant un défi majeur pour les agriculteurs à travers le monde. Pour atténuer les dommages causés par ce pathogène, il est crucial que les agriculteurs identifient précocement la maladie (en reconnaissant ses symptômes) et mettent en œuvre les mesures de contrôle appropriées.
L’oïdium résulte d’une infection par le champignon Podosphaera aphanis, un parasite obligatoire qui ne peut subsister que sur les tissus vivants d’une plante hôte. Ce pathogène prospère particulièrement dans des climats chauds et secs caractérisés par une humidité élevée. Il est plus fréquent dans les cultures de fraises cultivées sous serre ou dans des tunnels en plastique.
Lire aussi : Contrôle de l’humidité relative pour éviter l’oïdium de la fraise
Cycle de la maladie :
Dans des conditions favorables, le champignon continue son développement et sa propagation (production de spores). Des températures oscillant entre 15 et 27°C, des surfaces foliaires sèches, une humidité modérée à élevée ainsi que des conditions venteuses sont propices à la propagation de la maladie.
Il faut en général 7 à 14 jours pour qu’une structure appelée conidiophore germe et libère des spores. Le pathogène biotrophe pénètre dans un nouveau champ par le biais d’une source préexistante d’inoculum qui a survécu à l’hiver ou qui provient de feuilles ou de plants déjà infectés. Sous forme de cleistothèces (fructifications sexuelles), il peut survivre et subsister pendant l’hiver sur les restes de culture.
À maturité, au printemps avec l’élévation des températures, il libère des ascospores (visibles sous forme de taches noires sur la face inférieure des feuilles), constituant une source d’infection majeure pour la saison à venir (Figure 1C). La durée du cycle de vie dépend des conditions de température, d’humidité et de production de spores.
Symptômes courants de l’oïdium sur les fraisiers :
Plusieurs symptômes peuvent alerter un producteur quant à une infection de ses plants de fraises par l’oïdium. Ces signes se caractérisent notamment par la présence d’une poudre blanche sur les parties aériennes des végétaux, telles que les feuilles, les tiges, les fleurs et les fruits. Les feuilles jeunes et les tissus des fruits sont particulièrement vulnérables à l’infection.
Feuilles de fraisiers touchées par l’oïdium :
Habituellement plates, les feuilles saines de fraisiers peuvent développer de petites colonies blanches ressemblant à de la poudre sur leur face inférieure en début d’infection. Sous des conditions favorables, ces colonies peuvent s’étendre et recouvrir l’intégralité de la surface inférieure des feuilles. En cas d’infection sévère, les bords des feuilles se recroquevillent, exposant le mycélium blanc. Un exemple de mycélium fongique typique est visible sur la face inférieure d’une feuille. Il est important de ne pas confondre cet enroulement des feuilles avec les symptômes liés à un stress hydrique. Par la suite, les feuilles malades prennent des teintes violettes et rougeâtres. Le champignon peut également être observé sur la face supérieure des feuilles.
En cas d’infestation grave, l’oïdium peut entraîner une réduction du rendement et de la qualité des baies. Cela se manifeste par une diminution de la nouaison, des problèmes de maturation, des fissures et des déformations des fruits, lesquels perdent en saveur. D’importantes pertes post-récolte peuvent également survenir.
Propagation de l’oïdium :
Les spores de l’oïdium, appelées conidies, sont disséminées par le vent. Dans les nouveaux champs, elles peuvent être propagees par la plantation de matériel infecté, comme les plants. Les activités humaines au sein des serres, telles que l’utilisation d’outils, peuvent également contribuer à la dissémination des spores.
Stratégies de gestion de l’oïdium
Lutte contre l’oïdium dans les cultures de fraises :
Si l’oïdium n’est pas identifié et maîtrisé de manière adéquate en temps voulu, il peut réduire le rendement et la qualité des fraises jusqu’à 30 %. Ainsi, il est primordial d’identifier correctement la maladie et de surveiller son évolution dès les premiers stades d’infection.
Les mesures de gestion les plus couramment adoptées incluent l’application de fongicides et l’utilisation de variétés résistantes. Cependant, il est important de noter que la résistance du champignon aux fongicides est en croissance constante. De plus, la présence résiduelle de produits agrochimiques dans les fruits devient une préoccupation majeure sur le plan juridique, posant un risque pour la santé humaine. Par conséquent, de nombreux pays ont établi des limites légales pour les résidus de pesticides dans les denrées alimentaires.
Dans l’optique de réduire la dépendance aux fongicides, il est recommandé aux producteurs de fraises d’opter pour des méthodes de lutte intégrée contre les ravageurs (IPM), permettant de combattre efficacement l’oïdium.
Les 10 mesures pour une culture réussie de la fraise
1. Choix de variétés résistantes: Optez pour des variétés de fraises qui présentent une résistance naturelle à l’oïdium. Les variétés résistantes sont moins susceptibles d’être infectées, réduisant ainsi la pression de la maladie.
2. Rotation des cultures: Évitez de cultiver des fraises dans la même zone du champ d’une saison à l’autre. Une rotation des cultures réduit la concentration d’inoculum de l’oïdium dans le sol, ce qui peut contribuer à la réduction de l’infection. 3. Gestion de l’humidité: Maintenez un niveau d’humidité adéquat dans la plantation. Évitez les arrosages excessifs et assurez une bonne circulation de l’air autour des plantes pour réduire l’humidité relative et empêcher le développement de l’oïdium. 4. Taille et élagage: Effectuez une taille régulière des feuilles et éliminez les parties de plantes infectées. Cela permet d’améliorer la circulation de l’air et de réduire les surfaces foliaires humides propices à l’infestation. 5. Éclaircissage: Éliminez les plants de fraises trop denses pour réduire la densité de la canopée et favoriser une meilleure aération et une réduction de l’humidité. 6. Fongicides biologiques: Utilisez des fongicides biologiques à base de soufre ou d’autres substances naturelles qui sont moins nocives pour l’environnement et la santé humaine. Ils peuvent aider à contrôler l’infection lorsque les mesures préventives ne suffisent pas. 7. Ennemis naturels: Encouragez la présence d’ennemis naturels des pucerons, comme les coccinelles et les syrphes, qui se nourrissent des pucerons porteurs du champignon responsable de l’oïdium. 8. Applications ciblées de fongicides: Si nécessaire, utilisez des fongicides chimiques de manière ciblée et judicieuse, en privilégiant ceux ayant un faible impact sur l’environnement et la santé. Utilisez-les en combinaison avec d’autres méthodes de lutte pour maximiser leur efficacité. 9. Surveillance constante: Inspectez régulièrement vos cultures pour détecter rapidement les signes d’infection. Plus tôt vous identifiez l’oïdium, plus facilement vous pourrez le gérer. 10. Education et formation: Sensibilisez les intervenants et les travailleurs agricoles aux pratiques de lutte intégrée et à l’identification précoce de l’oïdium. Une connaissance approfondie de la maladie et des méthodes de lutte contribue grandement à son contrôle.
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