Des scientifiques découvrent comment l’agent pathogène du mildiou pénètre dans la plante.
Au 19ème siècle, le pathogène Phytophthora infestans a provoqué une grande famine en Irlande et dans d’autres parties de l’Europe occidentale. À ce jour, il continue de représenter une menace majeure pour la production alimentaire mondiale. La façon dont cet organisme microscopiquement petit et d’autres membres du genre Phytophthora pénètrent mécaniquement à travers la couche protectrice des feuilles des cultures restait un mystère.
Dans une collaboration unique, les experts de l’Université et de la recherche de Wageningen en pathologie végétale, biologie cellulaire et physique ont maintenant trouvé une réponse à cette question. Leur découverte fournit également de nouvelles pistes pour rendre le contrôle de Phytophthora plus efficace, plus efficient et plus durable sur le long terme. Leurs découvertes sont publiées dans Nature Microbiology.
Les plantes sont constamment menacées par toutes sortes d’agents pathogènes. Un certain nombre de ces intrus portant le nom de Phytophthora (littéralement : destructeur de plantes), causent chaque année d’énormes dégâts à toutes sortes de cultures, telles que les pommes de terre, tomates, aubergines, cacao, poivrons, soja et palmier dattier.
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Phytophthora non seulement constitue une menace majeure pour notre sécurité alimentaire, mais entraîne également de vastes dommages économiques, causant des dommages annuels au secteur de la pomme de terre d’environ 6 à 7 milliards d’euros. D’énormes ressources sont investies dans le développement de cultures résistantes grâce à la sélection végétale, dans le but de devenir moins dépendants de la protection chimique des cultures. Les nouvelles formes de cultures mixtes suscitent également un intérêt croissant.
Une autre option s’est maintenant présentée; empêchant Phytophthora d’accéder complètement à une plante. Les plantes sont équipées d’une couche protectrice qui sert à empêcher les intrus comme Phytophthora d’entrer. Pourtant, cet agent pathogène microscopiquement petit (moins d’un dixième de l’épaisseur d’un cheveu humain) est capable de pénétrer cette couche et d’initier son processus pathologique chez les plantes.
Malgré des décennies de recherche, on ignorait comment ils pénètrent mécaniquement cette couche. Pour résoudre ce problème, les phytopathologistes et les biologistes cellulaires du WUR se sont associés aux physiciens du WUR. Ces derniers sont des spécialistes de la mécanique, une branche de la physique qui étudie comment les objets et les matériaux se déplacent et réagissent sous l’action de forces agissant sur eux. Leurs connaissances combinées et de nouveaux outils de recherche développés en collaboration pourraient enfin résoudre ce casse-tête.
«Nous avons découvert que Phytophthora utilise des astuces pour affûter sa structure d’infection tubulaire pour ensuite couper à travers la surface de la plante avec un couteau tranchant. En utilisant cette stratégie, Phytophthora est capable d’infecter son hôte, sans force brute et avec une consommation d’énergie minimale. C’est la première fois que ce mécanisme est découvert, et c’est vraiment une découverte fondamentale », déclare Joris Sprakel, professeur de chimie physique et matière molle.
La professeure de phytopathologie Francine Govers voit de nombreuses pistes pour rendre le contrôle de Phytophthora plus efficace, plus efficient et plus durable à long terme. « Les lois de la mécanique nous disent que Phytophthora est incapable de pénétrer dans la plante sans d’abord s’attacher étroitement à la surface de la feuille. »
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Pour tester cette idée, première preuve de faisabilité, l’équipe de recherche a pulvérisé les feuilles de plants de pomme de terre avec une substance non toxique et peu coûteuse qui enlève le caractère collant de la feuille. Cela a entraîné une réduction d’environ 65% du niveau d’infection. L’effet est même passé à 100 % dans un essai optimisé sur des surfaces artificielles.
Outre la percée fondamentale et les outils d’investigation pour lutter contre ce type de maladie des plantes dans une nouvelle perspective, la recherche a également abouti à une nouvelle méthodologie ; une sorte de méthode de test rapide, qui peut révéler l’effet et l’efficacité des pesticides d’une manière rapide, précise et peu coûteuse. Ces nouveaux outils pourraient également apporter une contribution significative à la lutte en cours contre les maladies des plantes. Govers : « Grâce à l’engagement de Joris Sprakel et de son équipe, dont le doctorant Jochem Bronkhorst, nous savons maintenant qu’il existe un certain nombre de principes physiques fondamentaux qui pourraient donner une nouvelle tournure à la course aux armements entre les agents pathogènes et les plantes. Dans l’ensemble, cette recherche est un exemple vraiment merveilleux de la façon dont la collaboration au-delà des frontières disciplinaires peut conduire à des percées. »